mercredi 19 décembre 2012

L'heure des mamans


L’heure des mamans


Lorsque sonne la cloche annonçant la sortie,
Les mamans s’agglutinent devant le portail,
Pour mieux apercevoir le retour des petits
Qui vont, en rangs serrés, retrouver leur bercail.

Elles ont souvent le cœur qui bat un peu plus fort,
Car il leur a fallu mettre en veille l’amour,
Pour  économiser baisers et réconforts,
Qui calmeraient les cris et les chagrins de cour.

Ainsi vit chaque école, à l’heure des mamans,
Mais ce soir, à Newtown un portail s’est ouvert,
Pour laisser passer un cortège funéraire,
Au milieu des soupirs, des pleurs, des hurlements.


mardi 25 septembre 2012

Racines



Racines


Je suis de ce pays où le nez de la France
Flaire indifféremment l’Atlantique ou la Manche.
Je suis de la Presqu’île où l’averse s’épanche,
Pour gonfler le Blavet, la Vilaine et la Rance.

Chez nous, lorsque le ciel veut se teinter de plomb,
Et s’affaisser, jusqu’à étouffer les calvaires,
Ce n’est que pour montrer, sur les flancs des abers,
Les guirlandes dorées de la fleur de l’ajonc.

La mer qui se retire au bord de l’horizon
Nous laisse ses parfums de goémon iodé,
Pour revenir, plus belle, et d’écume fardée,
Transportant ses soupirs aux pieds de nos maisons.

Le soir, les goélands rassemblés sur les toits
Echangent des propos d’aventures marines,
Récoltées au hasard de belles brigantines
Qui vers le nouveau monde agitaient leurs pavois.

Je suis de ce pays où le nez de la France
Respire les embruns des vagues qui moutonnent,
Pour admirer, le soir, les soleils en partance,
Et gonfler les poumons de tout un Hexagone.

lundi 17 septembre 2012

à Laetitia


Le trou bleu


Celui qui baptisa les eaux de la carrière
Devait certainement songer au bleu des cieux,
Au manteau de Marie, au saphir le plus cher,  
Pensant que les brochets n’y verraient que du bleu.

Celui qui baptisa les eaux de la carrière,
Où s'inclinent les aulnes de Lavau-sur-Loire,
Y voyait le bonheur, la joie à ciel ouvert,
Sous l’onde transparente où glisse la nageoire.


Celui qui baptisa les eaux de la carrière
Où se mirent, le jour, les rameaux d’acacias,
Ignorait que le gouffre, au lieu d’un cimetière,       
Hébergerait un soir le corps de Laetitia.

lundi 2 juillet 2012

Aux jeunes martyrs Syriens


Ils ont les yeux ouverts, mais on dirait qu’ils dorment.
Alignés sur le sol, froidement assagis,
Quarante-neuf marmots, aux seuils de leurs logis,
Témoignent sourdement d’une violence énorme.

Dans les rues de Houla, ils couraient, comme court
L’enfant qui ne sait rien de la folie des hommes,
Qui tue aveuglément, qui égorge ou assomme,
Confondant à coup sûr, barbarie et  bravoure.

Il n’est aucun pouvoir obtenu par la mort,
Aucun honneur issu des larmes d’un enfant,
Aucune gloire à ceux qui nuisent aux vivants !
Honte aux tyrans qui règnent par le corps à corps !

Ils étaient des marmots qui couraient effarés,
Quarante-neuf bambins d’un pays torturé,
Quarante-neuf bourgeons d’un peuple décimé ,
Quarante-neuf enfants  qui imploraient pitié

mardi 7 février 2012

Chanson


Rupture











Je suis pris dans ta nasse,
Comme un vieux cabillaud.
Je rêvais des Sargasses,
Et je marine à Palaiseau.

Me r’mettre à flot,
Hisser la voile,
Me j’ter à l’eau,
Quitter ta toile,
Larguer l’anneau,
Changer d’étoile,
Sauter dans le premier métro.

Tu n’vois pas qu’on dérive,
Que notre amour prend l’eau ?
On n’suit pas la même rive,
Dis-moi c’qu’on fait sur ce radeau.

Prendre la vie
A rebrouss’-poil,
Vers Varsovie,
Se fair’ la malle,
Tu vois, Sylvie,
Faut qu’je détale…

Plus d’soupe à la grimace,
J’veux plus jouer les brise-glace,
Il faut refair’ surface.
J’ai rien à fair’ dans ton troupeau.

- On en r’parl’ra demain tantôt,
Ils vont r’froidir nos haricots !

mardi 10 janvier 2012

Poème


Retour au bercail












Que tu sois bourg, cité, hameau, bled ou village,
Qu’on te nomme lieudit, bourgade ou Saint-Glinglin,
Toi, mon pays natal, mon port et mon mouillage,
Mon berceau de campagne, mon tendre patelin,
Au fleuve de la vie tu es le seul rivage,
Tu es ma citadelle, je suis ton souverain.

Je revois ton clocher dressé vers les nuages
Et son fier coq en pâte tournant au vent salin,
Je cherche dans les rues les enfants de mon âge,
Je dessine des ailes aux ruines des moulins.

Je flaire tes parfums flottant sous les ombrages,
Je cherche dans l’ajonc la piste du malin,
Je vois des ailes grises agiter les feuillages,
Et danser les abeilles aux crinières des poulains.

J’imagine l’enfant, jeune oiseau de passage,
Picorant les fruits mûrs aux ronces des chemins,
Avant de s’envoler vers d’autres paysages,
Des alignements noirs, sans arbres ni jardins.

Ici, loin des sentiers, des bosquets, des herbages,
Je recherche souvent l’image du bambin
Que tu laissas partir, emplissant ses bagages
Des sanglots, des soupirs du village orphelin.

Avant de parvenir au crépuscule de l’âge
Avant de m’en aller vers des cieux incertains,
Que tu sois bourg, cité, hameau, bled ou village,
Qu’on te nomme lieudit, bourgade ou Saint-Glinglin,
Toi, mon pays natal, mon port et mon mouillage,
Nous nous retrouverons, mon tendre patelin.

Henri Philibert (04/04/1945- ?)